TOKOU, SELF-MADE ONE-WOMEN SHOW

*ARGOT : Salut Tokou. Est-ce que tu peux te présenter, en dehors de tes vidéos ?

Je suis une fille plutôt normale. J’ai 22 ans, j’habite dans le 94 à Fresnes. Juste à côté de la maison d’arrêt. Je vais reprendre des études dans pas longtemps. Un BTS en gestion de production audiovisuelle.

Tu écris, tu réalises, tu joues, où as-tu développé ces différentes facultés?

J’ai fait un bac littéraire, plusieurs années de théâtre. C’est un peu toute ma vie qui tourne autour de ça. Je n’ai pas vraiment appris, c’est juste ce que j’aime faire.

Ça date d’il y a longtemps tes aspirations de comédienne ? On a fouillé Google et on a trouvé un blog de 2006 avec des photos de toi qui te présente comme « mini actrice ». 

Nooooon. J’avais oublié. Vous êtes tombé là-dessus, je voulais être actrice ! J’avais fait ce blog avec mes sœurs et mes meilleures amies. On réalisait des mini films avec notre webcam, à l’ancienne, on était petites, j’avais 10 ans. Vous sortez des dossiers que j’aimerais mieux enterrer mais on a tous eu un skyblog au final. D’ailleurs je vais commencer à chercher les vôtres (rires).

Tu incarnes souvent des personnages masculins dans tes vidéos, dans les épisodes SHIT tu es toujours mise en scène avec des garçons, est-ce que l’univers des hommes t’inspire ?

C’est un domaine dans lequel je me sens à l’aise. Je suis entourée de mecs, je n’ai pas de frères, mais je traîne qu’avec des garçons. Je vis dans une cité et c’est un monde auquel je suis confrontée. Au final, c’est la chose qui me fait le plus rire, les mecs. Je veux juste montrer qu’en tant que meuf on en a vu des vertes et des pas mûres et que les hommes peuvent être mauvais. Non, mais avouez, vous êtes un peu idiots. (rires), Mais j’essaye de faire entrer des femmes dans mon univers parce que ce n’est pas une volonté de ma part de les laisser en dehors. J’ai toujours été féminine dans ma façon de me présenter. Je suis une femme et j’en suis fière.

Le quartier aussi est souvent abordé…

Oui bien sûr. J’avais juste envie de montrer que le quartier c’est pas qu’une histoire de deal. Il y a des trucs hyper marrants qui s’y passent. J’y ai vécu des expériences de malade, j’ai rencontré des gens incroyables, ça nous transmet des valeurs importantes et j’ai vraiment envie de véhiculer ce message-là à travers mes vidéos.

Est-ce qu’aujourd’hui t’as une idée de qui est ton public ?

Il y a de tout. Même si les situations mises en scène se déroulent au quartier, ce n’est pas pour autant qu’elles ne sont pas universelles. D’autres gens se reconnaissent. Quand je me promène dans la rue, je me rends compte que je peux toucher tout le monde. J’ai rencontré des hipsters, ça m’a choqué. J’ai des petits, des grands du quartier qui ont la cinquantaine, des blancs, des noirs, des Arabes, des asiats, des meufs, des gars. En fait je réalise que les filles font rarement rire les garçons et c’est dommage ! Le fait que des mecs viennent me voir et me disent « j’aime trop ce que tu fais », je suis heureuse qu’on reconnaisse mon travail. Ils se rendent compte qu’on est pas là que pour avoir la peau douce et sentir bon.

Quelles sont tes sources d’inspirations au quotidien ?

Je suis une grande enfant, je suis hyper branchée dessins animés. Je rigole devant des trucs de gamins genre Rick et Morty, American Dad, Family Guy et Bob l’Éponge qui me fait grave rire. Je m’en inspire beaucoup. Sinon ma mère est hilarante, mais vraiment hilarante.

Y’a plein de gens dont j’admire le travail, mais je ne puise pas la dedans pour le mien.

C’était important pour toi de te développer seule ?

C’était surtout de pouvoir montrer qu’avec un peu de volonté on peut faire les choses. Je pense qu’il faut qu’on arrête de se trouver des excuses. Pendant très longtemps je n’ai rien foutu, j’ai remis au lendemain. J’ai toujours su que je voulais faire de la comédie, mais je me suis beaucoup tourné les pouces en comptant sur la chance. Un jour, j’ai réalisé qu’il y avait des opportunités qui s’offraient à moi et que je devais les saisir, pour me prouver que j’étais capable de construire des choses.

Je suis issue d’une famille africaine et ce qui prime à leurs yeux c’est les études. Ce n’est pas évident de faire passer sa passion avant. J’ai fait pas mal de formations que je n’aimais pas, qui ne m’intéressaient pas. Ma mère a toujours été derrière moi, mais elle ne voulait pas que je me perde, c’est tout. Ce qui est normal !

Et dans le futur, tu nourris des rêves, des projets ?

J’ai un projet qui se met en place, je ne vais pas en parler, je crois au mauvais œil. (rires) Ça reste de la comédie, le sérieux viendra après. Je me vois plutôt évoluer en indépendant, faire mes preuves et bâtir mon projet moi-même, avec les gens qui m’entourent aujourd’hui. Podium TV avec l’équipe de Fababy qui me laisse une grande liberté et qui multiplie mes opportunités.

Quels sont les ingrédients de la réussite, à part le shit et le dolipranne (NDLR : Référence à la série SHIT de Tokou, disponible en 3 épisodes sur YouTube) ?

Se donner les moyens, croire en soi et sortir de sa zone de confort.

C’est quoi ton plat préféré ?

Alloco poulet.

Du coup avec qui tu rêverais de partager un alloco poulet ?

Avec Idris Elba et des chandelles ! Ce n’est pas parce qu’il y a un gardien de but qu’il n’y a pas but.

Si t’y arrives, je me charge du service !

Elle veut me tacler elle (rires).

Photos : João Bolan

Ecrit par
More from Fanny Joachim

DES STIGMATES DE MOLENBEEK AUX START-UP DE MOLENGEEK

Au lendemain des attentats de Paris, les médias du monde entier ont...
Lire la suite