LES ALCHIMISTES : LOUBNA KSIBI, FONDATRICE DE STARTUP BANLIEUE

Dans son célèbre roman « L’alchimiste », Paulo Coelho écrivait « si vous écoutez votre cœur, vous savez précisément ce que vous avez à faire sur terre. » L’équipe d’Argot consacre quelques unes de ses lignes aux leaders associatifs de demain. Ces femmes et ces hommes qui ont pris la décision  de s’engager dans les quartiers.


Habillée de son grand sourire, elle nous attend devant le portail. Loubna Ksibi est née il y une vingtaine d’années à Hayange, un petit village de Moselle. La région industrielle a été fortement marquée par une précarité économique et sociale. « Quand les usines ont fermé, le chômage a fortement augmenté. C’est dans cette réalité que j’ai grandi. »

« J’ai poussé une porte » 

À l’école, la cadette de la famille se décrit comme une enfant modèle et sportive. « J’ai même été classée 3e au Championnat de France de gymnastique ». Elle nourrit très jeune l’envie d’aider les gens. Une volonté qui la conduira en 2012 jusqu’aux bancs de la fac de médecine à Nancy. Elle réalise très vite que le cursus ne lui correspond pas et arrête sa première année. « Pas assez challengeant ! » Pour exploiter au mieux le temps qui s’offre à elle avant la fin de l’année scolaire, Loubna prépare les concours d’école de commerce. « En me baladant dans les facs, j’ai poussé la porte d’une conférence qui parlait de social business et d’impact positif. J’ai eu le déclic. »

En 2013, elle s’oriente vers Télécom école de management à Évry et déménage à Paris. « C’était une révolution. Non seulement le campus était cool, mais ce qui était encore plus cool, c’était la multitude d’associations. » Loubna crée très vite sa propre association dans le but de fédérer les musulmans de son école. Elle prend aussi part à une association internationale dont l’ambition est de permettre à tous de faire un stage à l’étranger. « Du coup, je suis partie au Bahreïn. »

Du leadership au Bahreïn à l’innovation en Californie 

« Je voulais voir comment ça se passait au Moyen-Orient. » En 2014, Loubna part pour le Bahreïn où elle donne des cours de leadership et enseigne des bases de business aux lycéens. » Trois mois plus tard, l’occasion d’étudier aux États-Unis se présente à elle. « La Californie ? Pour moi, c’était la terre promise de l’innovation et de l’entrepreneuriat. J’ai tout fait pour aller là-bas ! »

Après cet arrêt marquant par la case « Amérique », Loubna revient à nouveau en France. À l’époque, elle s’ennuie en stage chez PWC (cabinet d’audit et de conseil). « Je ne comprenais pas le principe de faire des heures pour enrichir des gens déjà riches. » Avec sa collègue Donia, elles nourrissent l’idée de « Meet My Mama ». « Ca me révoltait de voir les mamas à la maison cantonnées à leur cuisine alors qu’elles avaient un talent fou qui demandait qu’à s’épanouir. » La start-up est créée en 2016. « C’était mon premier step dans le numérique, l’entrepreneuriat et le social. »

« Donner du sens » pour « fédérer les gens »

Un jour, lors d’une livraison UberEats, Loubna prend le temps de discuter avec son livreur, Abdel. Ils échangent sur leurs situations respectives et elle lui parle de son jeune projet de start-up. « Il m’a dit “Je n’ai pas d’argent, mais si tu as besoin d’aide, je plaque tout !”. Je me suis rendue compte que tout résidait dans le fait de donner du sens. » Abdel lui parle alors de son rêve : travailler dans les diamants. « On a trouvé une formation que Pôle Emploi a payée. Il a obtenu 16 de moyenne alors qu’il n’avait jamais révisé de sa vie. »

Suite à cet épisode, une autre idée commence à germer dans l’esprit de Loubna. Elle lance un coup de gueule sur Facebook pour encourager les nombreux « Startup Weekend » à traverser le périphérique. Elle leur reproche de toujours organiser leurs événements dans les grandes écoles de commerce, avec la même population. « J’ai tagué quelques personnes dans mon post. Un groupe Facebook s’est créé et aujourd’hui il y a plus de 300 membres. Après ça, j’ai fait une première réunion. Faute de locaux, on se donnait rendez-vous au Quick. »

Une réunion en entraînant une autre, la première édition de Startup Banlieue est sur le point de voir le jour ce week-end à Montreuil et Saint-Denis. « Notre prochain challenge, ça serait un tour de France des banlieues pour essaimer le projet. » Au regard de la détermination et de l’envie de Loubna Ksibi, l’avenir radieux de Startup Banlieue laisse peu de doute.

Photos : Joao BOLAN

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